épisode 3 - Lauzès

Rédigé le 23/05/2023
la mairie


Rappel / pour retrouver l'épisode 2 - Cabrerets - Cras facilement, c'est ICI / épisode 2


La résistance dans les cantons de Lauzès

épisode 3 - Lauzès

Caserne de gendarmerie désaffectée (derrière l’ancienne école primaire)


LAUZÈS 
 
Extrait d’un document du Musée de la résistance de Cahors : 
 
"Le 11 mai la “Das Reich” investit Lauzès.
 
La poste est occupée et les communications téléphoniques coupées. Les gendarmes désarmés et tous les hommes sont conduits au centre du bourg. Les familles des gendarmes sont rassemblées dans un logement de la caserne et placées sous surveillance. Les maisons sont fouillées.
 
Au cours de ces opérations le parisien LALO Abel, originaire de Lauzès, réfugié dans sa famille est abattu ainsi que Jeanne MONCOUTIÉ et sa fille Berthe.
 
François JUBIN, médecin de la Marine, mis en disponibilité à sa demande s'installe comme médecin de campagne à Lauzès. Il adhère à l'O.R.A. (Organisation de Résistance de l'Armée) puis aux F.T.P. Il est commandant de la 2ème compagnie du bataillon sud. Il est tué par les Allemands qui ont investi Gourdon le 26 juin 1944. Nous lui avons rendu hommage dans notre chronique.
 
La mission de JUBIN, de son P.C. de Lauzès, est l'organisation des « Statiques », travailleurs le jour, saboteurs la nuit et le 6 juin 1944, à la suite de l'état d'alerte général et ordre de mobilisation la formation des “groupes de réserve”, dans les communes sous sa responsabilité, allant de Vers à l'ouest, à Blars à l'est et des Masseries au sud, à Sénaillac-Lauzès au nord.
 
En dehors des villages déjà cités nous trouvons Cras, Lentillac du Causse, Orniac, Sabadel-Lauzès, Saint-Cernin, Nadillac, Saint-Martin-de-Vers. Rappelons que dans notre département plus de 2.000 “statiques” rejoindront les F.F.I. et iront se battre à la Pointe-de-Grave, les Vosges ou l'Alsace pour la libération de notre pays”.
 
Le village de Lauzès était à l’époque plus important qu’aujourd’hui. Des foires importantes s’y tenaient (voir bascule devant la Mairie) et de nombreux commerces. Il était au centre géographique des trois secteurs des maquis du Lot (Cahors, Figeac/Cajarc et Souillac/Saint-Céré), un peu à l'écart des grands axes. Cette situation en faisait le point de rencontre des chefs des maquis lotois qui savaient y trouver un noyau important de sympathisants sûrs : François JUBIN, Georges DUVEAU ou la famille COURTIOL qui possédait une maison à Bourbous (un hameau discret à l’écart). CHAPOU y venait souvent et y dormait quelquefois.
 
Le 11 mai 1944, la Division Das Reich arrive à Lauzès tôt le matin. 
 
Les Allemands neutralisent et désarment les gendarmes,  ils occupent la poste, le téléphone est coupé. Ils rassemblent tous les hommes sur la place du village. Les familles des gendarmes sont consignées à la gendarmerie sous bonne garde. 
 
 “HERCULE” dirige les opérations. 
 
Les Allemands bien renseignés connaissent leur mission. Ils recherchent plusieurs personnes : le Commandant PHILIPPE (CHAPOU), Ernest COURTIOL et le médecin du village le docteur François JUBIN, chef de secteur de l’O.R.A. (Organisation de Résistance de l’Armée). 
 
Ils fouillent et pillent les maisons avec brutalité. 
 
Ernest COURTIOL est communiste, résistant de la première heure, ami de Marcel METGES du Café du Midi à Cahors (actuelles pompes funèbres 93 boulevard Gambetta), lui-même proche de Jean-Jacques CHAPOU. 
 
Le 17 août 1943, quand CHAPOU et sa troupe (un des premiers maquis du Lot) voient leurs premières planques devenir dangereuses à Arcambal, METGES l’envoie vers un ami sûr : Ernest COURTIOL. 
 
 
CHAPOU et ses amis d’échappent de justesse à l’encerclement par la Milice, en face de Saint-Géry aux grottes de l'Iffernet. Ils traversent le Lot.
 
Ernest COURTIOL les accueille à Lauzès et les conduit à quelques kilomètres au sud, à la ferme de Malaterre. 
 
Cette propriété, paradoxalement, appartient à Anatole de MONZIE, Député-Maire de Cahors, Ministre, personnage ambigu qui connaitra quelques ennuis à la Libération. 
 
Joachim CARBELLO-CARPI (nda : De son vrai nom Joaquin CARBELLU CARPI, militant de la CNT de Villanueva de Sigena (Huesca) avait été emprisonné en Espagne le 9 décembre 1933. La CNT était une organisation anarcho-syndicaliste catalane (Confederación Nacional del Trabajo). Réfugié en France, il participait à la Résistance quand il fut tué par les SS le 11 mai 1944 à Malaterre) est détaché  d’un GTE.
 
Officiellement, il aide à la ferme de Malaterre, mais en même temps, il est résistant et assure la garde des réserves du maquis. Les Allemands le surprennent tôt le matin du 11 mai 1944. Il sera tué. D’autres Espagnols s’enfuient ou sont arrêtés sans qu’on sache qui, et combien.
 
Les parents COURTIOL outre leur ferme de Bourbous, tiennent une petite boutique de draperie-mercerie à Lauzès. Ernest le père, effectue des transports et s’approvisionne à Cahors à bord de sa camionnette Citroën C.4. 
 
Pour l’anecdote : un matin où il rapporte deux sacs de tabacs, de la Régie des Tabacs de Cahors, destinés à Lauzès et Saint-Cernin, des maquisards l’arrêtent dans le bas de la côte de Guillot et l’obligent à lui remettre les sacs contre un reçu...
 
Le 11 mai 1944, les trois fils COURTIOL ont dormi à la mercerie : Francis,  Roland et Lucien l’aîné. Roland est accompagné d’Alfred SIRVEN (celui de l'affaire ELF) un camarade de classe du Lycée Gambetta à Cahors ! 
 
SIRVEN demandait avec insistance à entrer au maquis, mais avait été jugé trop jeune. Quand les Allemands arrivent le 11 mai, Roland réussit à s’enfuir à travers champs, Lucien n’a pas le temps. Il se couche derrière un mur. Alfred SIRVEN surpris, se cache à l’étage, dans un fût servant à fumer les jambons sous la cendre. Les Allemands voient le fût mais n'y prêtent pas attention et s’en vont.
 
Ils embarquent Francis (14 ans). Francis aurait été libéré (?) une heure plus tard sur l’insistance de M. LÉONARD l’instituteur de Sabadel-Lauzès : “Regardez-le c’est un gosse, laissez-le…” (François SAUTERON dans son livre ”Deux beaux salauds” donne une autre version de la mésaventure de Francis COURTIOL (à lire en fin d’ouvrage dans le paragraphe consacré à HERCULE)) . Son frère Lucien n’aura pas cette chance… il se relève et court dans la combe voisine. Un Allemand l’aperçoit, tire, le blesse à la jambe et l’arrête.
Ernest et son épouse ont dormi à la ferme de Bourbous cette nuit là. Un “bon Français” local, accompagnera HERCULE et les Allemands jusque là. Il sera formellement reconnu par Madame COURTIOL. 
 
Ernest COURTIOL, le père, a entendu l’arrivée des Allemands et les tirs d’armes automatiques à Lauzès. 
Il a fui dans les bois quand Roland arrive à bout de souffle pour avertir ses parents. Madame COURTIOL l’envoie rejoindre son père à Berguil, au-dessus de la vallée du Vers. Tous deux resteront  cachés plusieurs jours dans les cazelles dite “du maquis” aux Bourbous (sur les “chemins qui parlent”). Les Allemands ne prennent pas le risque de poursuivre les fuyards dans des lieux qu’ils ne connaissent pas.
 
Le docteur François JUBIN aussi était à Lauzès. Lui non plus n'a pas le temps de s'enfuir. 
Il ouvre précipitamment la soue aux cochons chez MARTY et se couche dans la “paille” (actuellement chez Claude GRIFFOUL) ; les Allemands passent et repassent à quelques mètres de lui sans le voir. Il y restera terré toute la journée. “Le cochon, profitant de la porte laissée ouverte se promenait dans le village”, dira Madame MARTY... 
 
Cette pauvre femme a tellement peur que JUBIN soit découvert qu’elle le laisse divaguer et qu'elle reste paralysée devant la porte de sa maison. Un Allemand, croyant qu’elle surveille les lieux, lui donne un tel coup de pied au derrière, qu’elle en demeurera marquée et traumatisée jusqu’à la fin de sa vie. 
 
Dans le haut du village, Raymond BOUSCARIE s’enfuit. Une rafale de mitraillette le manque. Il monte vers sa maison du Mas Delfour et court se réfugier dans les bois. 
 
 
François JUBIN